Madame Papon nous a d'abord expliqué l'évolution géologique aboutissant à la formation de ces sources avant de décrire, à la manière d'une conteuse, les différentes étapes qui ont conduit à la naissance d'un travail artisanal d'abord grossier, puis évoluant insensiblement vers un art tout en finesse.
La chose reste encore méconnue : l'un des plus anciens volcans du
département se trouve sous les pieds des Clermontois. Le centre-ville est en
effet bâti sur un cratère volcanique, né de la rencontre « explosive » entre
une remontée de magma et une nappe phréatique profonde, il y a environ 156.000
ans. La faille qui a permis à l'époque le passage du magma a également laissé
remonter des eaux thermo minérales. Le maar de Jaude – c'est ainsi qu'on le
nomme – d'environ 1.500 m
de diamètre, est bordé par la butte qui constitue aujourd'hui le plateau
central.
Sa lèvre nord, légèrement abaissée, forme une espèce de « bec verseur
», d'où les eaux thermo minérales du cratère débordent et suivent la pente en
direction de la Tiretaine. Là, elles circulent à faible profondeur, surgissant
spontanément en quelques points bas. C'est sur ce cheminement qu'ont été
creusés les puits de captage permettant de diriger ensuite les eaux vers les
établissements de pétrification.
À la fin du moyen âge, le quartier
Saint-Alyre est un faubourg occupé par de nombreux monastères; il est constaté
d'étranges arches que l'eau semblait construire d'elle-même, jusqu'à devenir
des ponts. Une curiosité extraordinaire qui, dès le 16ème siècle,
faisait l'objet de visites. mais Il faudra attendre la deuxième moitié du 17ème pour
voir naître l'idée de pétrification volontaire, et le premier tiers du 18ème pour
que l'on songe à domestiquer les sources. On parlera dès lors d'«incrustation
».
Le principe ? Lors de l’arrivée
de l’eau à l’air libre, le carbonate se précipite sous forme de cristaux aux
grains grossiers puis de plus en plus fins. À partir de ces observations, des
installations, bassins et échelles sont construits et un long travail de
patience, de recherche et d’essais est mis en œuvre pour obtenir des résultats
de plus en plus artistiques. Au début, on procédait au recouvrement des objets
par quelques millimètres de calcaire. La seule intervention consistait à les
retourner régulièrement pour obtenir un dépôt uniforme. Des animaux naturalisés
furent également pétrifiés puis des mannequins habillés de costumes locaux . Au
début du XIXème siècle, une nouvelle méthode de travail, beaucoup plus complexe,
commence : l’incrustation sur moulage, qui consiste à obtenir un dépôt
très fin et extrêmement régulier sur un moule qui fut d’abord en soufre puis en
gutta-percha (une gomme végétale naturelle), réalisé à partir d’un original en
cuivre. La méthode s’est perfectionnée au fil des ans jusqu’à obtenir des
bas-reliefs quasiment translucides, d’une couleur proche de celle de l’ivoire.
Cette teinte est donnée par l’oxyde de fer contenu dans l’eau que l’on épure
plus ou moins, selon le résultat désiré, en la faisant circuler dans des canaux
remplis de copeaux de bois.
Ces procédés restent utilisés aux fontaines pétrifiantes de Saint Nectaire, où Éric Papon, septième maillon d'une même famille, s'applique à perpétuer la tradition.
M-Thé C